L’importance des soins dentaires chez le cheval – Les dents de loup

Mireille Godbout, D.M.V., M. Sc., IPSAV

Au début du mois de mai, Shana et Vince, deux jeunes chevaux Percherons d’un peu plus d’un an avaient rendez-vous avec le Service ambulatoire équin pour leur premier examen dentaire et l’extraction de leurs dents de loup.

Les dents de loup

Les dents de loup sont de petites prémolaires atrophiées et vestigiales que l’on peut comparer aux dents de sagesse chez l’humain. On les retrouve chez la majorité des chevaux; elles font éruption juste devant les premières prémolaires supérieures (exceptionnellement retrouvées devant les prémolaires inférieures) et peuvent être de taille et de forme assez variées. Bien qu’on les confonde parfois avec les canines (surtout chez les mâles), ce sont deux structures bien différentes! Les dents de loup font leur apparition généralement vers l’âge de 5 mois à 1 an, alors que les canines poussent beaucoup plus tard, soit entre 4 et 6 ans, et sont retrouvées plus près des incisives. Certains chevaux présentent une dent de loup seulement d’un côté alors que chez d’autres, plus rarement, la dent de loup restera logée sous la gencive ou fera éruption à un endroit inhabituel. C’est généralement dans ces situations que l’on peut retrouver un inconfort buccal, d’une part parce que la dent peut demeurer recouverte de tissu sensible, mais aussi parce qu’elle peut se retrouver à un endroit inapproprié à sa croissance.

Pourquoi les enlève-t-on presque systématiquement chez nos chevaux domestiques si elles sont si petites et vraisemblablement anodines? Parce que le contact entre les dents de loup et le mors peut provoquer une gêne, une sensibilité ou même une douleur plus franche. L’extraction d’une petite dent de loup en croissance est beaucoup plus facile que chez un cheval mature où elle s’est fusionnée à l’os de la mâchoire qui la borde; c’est pourquoi nous recommandons de réaliser la procédure lorsque votre cheval est encore jeune. De plus cela évite d’avoir à rééduquer la bouche de votre cheval si vous devez les extraire plus tard en raison d’un inconfort qui s’est développé en cours de route.

Comme toutes les dents, les dents de loup sont aussi innervées et nourries par des vaisseaux sanguins. Au moment de l’extraction, le cheval devrait être sous sédation et un bloc local de solution anesthésique devrait être réalisé (comme lorsque l’on va chez le dentiste!). Le but est toujours d’extraire la dent ainsi que sa racine complète, mais cela n’est pas toujours possible selon la taille de la dent et la forme ou le nombre de racines présentes. Une dent de loup mal extraite (fracturée) peut occasionner une douleur persistante en raison du tissu nerveux exposé, il faut donc être vigilant. Certaines dents se retirent en deux temps, trois mouvements (littéralement!) alors que d’autres à la racine plus longue nous donnent un peu plus de fil à retordre; certains cas substituent carrément notre visite quotidienne au gym et on en ressent encore les effets le lendemain.

Lorsque vous prenez rendez-vous pour extraire les dents de loup, votre vétérinaire en profite aussi pour faire un examen complet de la bouche de votre jeune cheval. Idéalement, tout cheval devrait avoir un premier examen dentaire avant l’âge d’un an. Nous recommandons des examens une à deux fois par an pour la plupart des chevaux âgés de 2 à 4 ans; c’est l’âge moyen où ils perdent leurs dents de lait et où les dents d’adulte font éruption. Il existe de nombreuses anomalies qui peuvent survenir au cours de ce processus, ce qui peut parfois occasionner des déséquilibres dentaires ou des problèmes plus graves tels que la maladie parodontale plus tard au cours de leur vie. Dès l’âge d’un ou deux ans, de petites aspérités (pointes dentaires) peuvent aussi être présentes et leur blesser les joues ou la langue. Lorsque c’est le cas, les chevaux vont rarement démontrer un inconfort buccal, même lorsqu’ils mangent; ce n’est guère un indicateur fiable pour déceler ce qui se passe dans leur bouche. De plus, si des anomalies dentaires sont présentes, mieux vaut les adresser le plus tôt possible pour éviter qu’elles ne causent des problèmes chroniques. Cela est d’autant plus vrai chez les petits poneys et chevaux miniatures, qui gagnent en popularité. Vu l’espace buccal restreint, nous observons plus d’anomalies dentaires chez eux.

Une visite intéressante!

Mais revenons à Vince et Shana! Bien qu’ils aient sensiblement le même âge et le même gabarit, nous avions deux portraits assez différents une fois l’ouvre-gueule en place. Vince présentait deux dents de loup assez volumineuses; on voit d’ailleurs toute la concentration de notre interne Dre Laurence Arpin, qui est en train d’extraire la dent de loup gauche.

Shana nous a quant à elle réservé une petite surprise; elle n’avait pas une, mais bien DEUX petites dents de loup à droite, indépendantes l’une de l’autre. Celle retrouvée plus à l’avant faisait d’ailleurs à peine protrusion de la gencive, et aurait probablement été dérangeante une fois le mors en bouche.

Dents de loup chez le cheval

Pour finir le tout en beauté, Dre Godbout a nivelé les petites aspérités qui étaient déjà présentes sur quelques dents de leurs mâchoires supérieures.

Vétérinaire effectuant un examen de dentisterie équine

Malgré la journée un peu éprouvante, Vince et Shana ne sont pas trop à plaindre – nos deux gentils géants ont eu droit à un bain de soleil une fois bien réveillés de leur sédation; si c’est pas ça la vie!

Merci à Catherine Martinot (propriétaire) pour les photos de Vince et Shana.

Chevaux couchés au paddock